Vivre by Nathalie Le Gendre

Auteur:Nathalie Le Gendre [Gendre, Nathalie Le]
La langue: fra
Format: epub
Publié: 0101-01-01T00:00:00+00:00

Chapitre 4

En revenant à lui, Gabriel se frotta l’arrière de la tête où pointait une bosse. Il grimaça sous la douleur.

Le paysage avait de nouveau ce voile grisâtre qui le rendait flou, et l’étrange silhouette avait disparu.

— Et si c’était un extraterrestre ? murmura le jeune garçon en se redressant après avoir ramassé son carnet. Ou était-ce peut-être tout simplement mon imagination... ou alors...

Il scruta les alentours.

— Ou alors c’était toi, Nael?

À peine avait-il achevé sa phrase que la nature se modifia et se peignit des couleurs d’un champ de coquelicots bientôt cerné d’une forêt de bouleaux.

— Ça alors ! C’est trop fort ! On dirait le champ près de notre maison sur Terre, celui dans lequel Nael adorait courir...

Et là, il la vit de nouveau. À l’autre bout du champ. Elle dansait, ses longs cheveux blonds virevoltant autour de sa silhouette gracile.

— Nael!

Gabriel s’élança à sa rencontre. Il courut à en perdre haleine tout en zigzaguant entre les coquelicots pour ne pas les écraser et en criant le surnom de sa sœur. Mais plus il se rapprochait, plus le corps d’Annabelle s’altérait et il ne fut bientôt plus qu’une forme fantomatique.

Le jeune garçon s’arrêta net. Le champ de coquelicots s’évapora. Ne restait face à lui que l’étrange silhouette aperçue un peu plus tôt et, aucun doute, c’était bel et bien un extraterrestre ! Gabriel était terriblement déçu. Toutes ces transformations étaient absurdes, c’était à devenir fou !

Il observa la créature. Elle possédait deux jambes et deux bras, mais plus longs que ceux d’un humain. Son corps élancé, presque translucide, oscillait sous le vent et semblait hésiter entre grandir ou rapetisser. Les traits de son visage restaient flous. Comme si son nez, ses yeux, ses oreilles voulaient poindre sans toutefois s’y résoudre totalement. La bouche n’était qu’un infime trait grisâtre. Rien de plus.

Gabriel se frotta les paupières pour vérifier si cela venait de sa vue brouillée par la sueur. Mais non.

— Arrête de bouger, bon sang ! s’exclama-t-il, agacé de ne pouvoir correctement distinguer l’extraterrestre.

Aussitôt la silhouette vibra. Son nez, ses oreilles, ses lèvres se rétractèrent comme les cornes d’un escargot. Seuls subsistaient deux grands yeux triangulaires pointant vers le bas, sans cils ni sourcils.

Gabriel aurait tellement aimé qu’Annabelle soit à ses côtés pour partager sa découverte. Au lieu de cela, il était seul, avec pour unique compagnie ses souvenirs et sa peine.

— Non ! s’indigna-t-il. Je ne suis pas seul ! Nael est toujours avec moi grâce à mon carnet. Jamais je ne l’oublierai comme l’ont oubliée papa et maman. Jamais !

Un violent courant d’air le fit suffoquer. Devenu multicolore et difforme, l’extraterrestre tournait sur lui-même comme une girouette sous la tempête.

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